Une
gestion performante des clients mécontents
doit être alignée avec l’objectif premier de toute entreprise : la
rentabilité. Il ne faut pas tomber dans l’angélisme, sans retour sur
investissement aucune activité n’aura les faveurs durables de l’entreprise et plus
particulièrement de la Direction Générale. Or l’atteinte d’un tel objectif pour
un Système de Traitement de l’Insatisfaction Clients (STIC) passe par une
démarche structurée et planifiée.
Des clients mécontents c’est aussi des actionnaires mécontents
Adaptée de Scriabina et Fomichov, Quality Progress; Sep 2005 |
Ce
rapport montre clairement l’impact que pourrait avoir une politique de
satisfaction et de fidélisation des clients insatisfaits sur la rentabilité des
entreprises. On sait que la fidélité client se mesure avec deux éléments, la
satisfaction et la recommandation. La satisfaction seule n’est pas suffisante
pour générer la fidélisation. Elle ne mesure que la qualité perçue. La
recommandation révèle la confiance accordée au prestataire. Cette dernière est
à la base d’une relation client forte et durable.
La fidélisation à la base de la rentabilisation des clients insatisfaits
Alors
que la qualité d’une prestation est copiable par les concurrents, les éléments
concourants à la confiance ne le sont pas. Ils font partie de la culture de
l’organisation : son « génotype » qui est unique. Ce patrimoine
est porté par toutes ses fonctions, son réseau, son image, ses clients…
C’est
pour cette raison que le traitement de l’insatisfaction est important. Une bonne
gestion des réclamations renforce la satisfaction et la confiance du client :
ce dernier peut compter sur son prestataire. De nombreuses études montrent qu’un
client mécontent qui est satisfait est plus fidèle et achète plus qu’un autre
n’ayant pas eu de raison d’insatisfaction. Malheureusement beaucoup
d’organisations ne savent pas exploiter ce filon bien qu’il soit une activité
historiquement constitutive du commerce (voir l’article à ce sujet). Elles considèrent
cette fonction comme un poste de coûts à réduire et non comme un investissement à rentabiliser.
Rentabiliser le Traitement de l’Insatisfaction Clients en 4 temps
Le
tableau1 présente une évolution des taux de satisfaction d’une entreprise qui a
décidé d’améliorer son STIC en 4 phases. Illustrons la rentabilité du Système de Traitement de l’Insatisfaction
Clients (STIC) pour ce cas.
Le
contexte initial est caractéristique d’une situation courante avec 80% de clients
satisfaits et 70% des clients mécontents qui ne réclament pas. Le service
clients contente 30% de réclamants, en calme 50% et 20% restent insatisfaits.
Le graphe 1 montre que le nombre de défections est
supérieur au nombre de réclamants : seule une minorité de clients
mécontents réclament alors que 10 à 20% des consommateurs quittent annuellement
leurs prestataires. Les pertes dues à la défection des clients sont importantes
(Graphe 2). La bonne nouvelle est que les réclamants sont ceux qui font le moins
défection. En fait même si son traitement des réclamations n’est pas performant,
une entreprise est obligée de tenir compte d’une partie des plaintes si ce
n’est que par peur d’un litige ou d’une mauvaise publicité.
Graphe 1 :Nombre de clients mécontents en fonction de l'évolution de la gestion des réclamation (d'après le modèle de calcul de Voice Of Customer Care) |
Graphe 2 :Gain et couts générés par le Système de Traitement de l'Insatisfaction Clients (d'après le modèle de calcul de Voice Of Customer Care) |
1. Transformer la réclamation en satisfaction
L’entreprise
décide d’améliorer le traitement opérationnel des réclamations (rapidité des réponses, équité des
solutions, empathie…), avec comme objectif : 70% de réclamants satisfaits,
20% calmés et 10% insatisfaits.
Le graphe 1 montre que lors de cette phase les
défections diminuent. Les couts régressent et les gains engendrés par la
rétention des réclamants augmentent (Graphe 2). La raison est qu’il coute moins
cher de satisfaire un client mécontent que de recruter un nouveau client. Cependant, une grande majorité de clients mécontents continuent
de partir sans s’exprimer. « Quelles sont les raisons qui empêchent
tous les clients de réclamer ? » est la question à se poser pour
passer à la phase suivante.
Toutefois
il est important de garder à l’esprit que la performance du traitement
opérationnel des réclamations est un préalable à toute amélioration. La
facilité du dépôt des réclamations (disponibilité 24/7, multi-canal, simplification
des procédures…) va, dans un premier temps, engendrer une augmentation de
volume qu’il faut anticiper. Il est donc nécessaire d’évaluer l’impact de
chaque décision sur ce processus. Si les conditions ne sont pas adaptées aux
types et à la masse de plaintes en fonction des canaux, des périodes, des
horaires etc. il se produit un effet inverse à celui recherché. Ce qui est très
dommageable pour l’image de l’entreprise.
2. Transformer l’insatisfaction en réclamations
L’entreprise
décide lors de l’étape suivante de faciliter
le dépôt des réclamations pour augmenter le nombre des réclamants.
Le graphe 1 montre que l’hémorragie des défections
ralentit malgré l’augmentation des réclamations. Le solde Gains/Couts est
stable en dépit de l’augmentation du cout engendré par les plaintes (Graphe 2).
L’entreprise n’a rien perdu, au contraire les clients réclamants lui font
confiance, sont plus fidèles et achètent plus. Par contre le taux de
satisfaction globale ne varie pas, l’entreprise a toujours autant de clients
insatisfaits de ses produits et services. « Quelles sont les améliorations
à apporter à nos prestations pour satisfaire plus de clients ? » est
l’objet de la 3ème phase.
3. Transformer la satisfaction en fidélisation
L’entreprise
décide d’améliorer la qualité des
prestations à partir des remarques des clients améliorant ainsi le taux de
satisfaction globale.
Le graphe 1 montre que les nombres de clients
insatisfaits, réclamants et faisant défection régressent simultanément. Le
solde Gains/Couts devient positif permettant à l’entreprise de rentabiliser son
STIC (Graphe 2), d’améliorer son image et d’être moins fragile aux attaques des
concurrents par la fidélisation de ses clients. A ce stade l’entreprise a momentanément
réussi son pari: CQFD. « Comment perpétuer cette source de profit ? »
est la question à se poser pour la dernière phase de ce cycle.
4. Transformer la fidélisation en rentabilisation
Le
phasage par type d’action a été choisi pour isoler l’impact de chacune des améliorations :
traitement des réclamations, facilitation des plaintes et qualité perçue
des prestations. Dans les faits plusieurs types d’actions peuvent être menés
conjointement : on n’attend pas 3 ans pour corriger un dysfonctionnement;
lancer un numéro vert pour faciliter les réclamations va nécessiter d’adapter
les ressources… En fait les courbes ne sont pas rectilignes, elles sont en
dents de scie puisqu’on avance par progrès successifs. La 4ème phase
est donc de reboucler sur la phase 1 après chaque cycle d’amélioration du
système.
Une démarche cyclique en spirale
La
démarche à 4 temps du STIC est une approche cyclique en spirale. Au début il
faut se limiter à un nombre restreint d’aspects (par exemples : le temps
de réponse aux réclamations, une cause d’insatisfaction, un segment client…).
Ensuite le cercle s’élargit (ajout d’un nouveau canal pour les réclamations,
l’autonomisation des chargés de clients…). Cette approche permet d’accompagner
le changement de culture d’entreprise nécessaire à la mise en place d’une écoute
client. Néanmoins il y a trois impératifs pour la réussite de cette démarche :
- Planifier la mise en œuvre du système et des actions à mener dans le cadre d’un plan stratégique de l’entreprise les plaçant ainsi dans la durée avec une implication de toute l’entreprise.
- Evaluer régulièrement les réussites et les échecs des actions menées et communiquer dessus permettant par là de capitaliser sur les expériences passées et de maintenir une motivation de l’organisation.
- Déployer le processus et décrire son mode de pilotage pour l’intégrer dans le système de management.
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